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Doris Lessing, mort d’une femme libre


Doris Lessing, Cologne, 2006

Doris Lessing, Cologne, 2006 (Photo credit: Wikipedia)

 

L’auteure du Carnet d’or est morte hier, à l’âge de 94 ans.

 

A l’annonce de son élection au Prix Nobel en 2007, elle avait fait la moue… Certes, Doris Lessing s’est toujours tenu à l’écart d’un milieu littéraire qu’elle jugeait décevant, voire hypocrite. A 88 ans, son œuvre, importante, avait été récompensée par de nombreux prix, ce qui ne l’émeuvait guère. N’avait-elle pas joué un tour à son éditeur en 1983, lorsqu’elle signait un de ces romans sous pseudonyme (Jane Somers) pour tester la « validité » de ceux censés la lire depuis toujours et reconnaître sans hésitation son style. Or le roman avait été refusé, par sa maison d’édition habituelle comme par d’autres. Né en Perse – aujourd’hui Iran-, Doris May Tayler passe son enfance dans l’actuel Zimbabwe. Scolarisée jusqu’à ses 14 ans, elle travaille très tôt pour subvenir à ses besoins et se passionne par ailleurs pour la littérature. De la lecture, elle passe à l’écriture et part à Londres en 1949 avec le plus jeune de ses trois enfants et un manuscrit, après avoir vécu deux mariages sans succès. Publié en 1950, Vaincue par la brousse (10/18, 1999) connaît un succès qui marque le début de sa carrière littéraire. En France, il faut attendre le Carnet d’Or pour que Doris Lessing soit connue du lectorat. Elle reçoit d’ailleurs le Prix Médicis en 1976 pour ce roman paru en 1962 en Angleterre. On la relie alors à des engagements qu’elle n’a pourtant jamais revendiqués : dès lors, plutôt que « Communiste » (elle est membre du parti entre 1952 et 1956) ou « féministe » (au regard de ce qu’elle a écrit dans le Carnet d’Or), on la rebaptiserait volontiers Libertaire, sans autres précision. En septembre 2008, elle accordait un entretien au Magazine Littéraire, où elle livrait un bilan de sa carrière et témoignait de l’impact du Prix Nobel sur son statut d’écrivain.

Source: Le magazine litteraire

 

Nobel de littérature: sur quel écrivain placer votre argent ?


Jour de Nobel dans les bureaux de BibliObs. (Jin Lee/AP/Sipa)Face à l’instabilité du contexte économique, la dégradation des dettes souveraines et la parution des très mauvais chiffres de la balance commerciale moldave, les investisseurs hésitent à prendre des risques sur les marchés financiers. Et ils ont raison !

Heureusement pour eux, il existe des marchés secondaires où il est encore possible de réaliser de belles plus-values. Notre conseil de la semaine : surveiller les fluctuations des valeurs sur le Nobel de littérature. Mais il ne faut pas traîner. La clôture des échanges aura lieu jeudi 10 octobre, dans l’après-midi, avec l’annonce des résultats annuels du Comité Nobel, réuni pour un conseil d’administration exceptionnel à Stockholm.

En attendant, rien ne vous empêche de vous positionner. Vous trouverez les cotes sur le site britannique Ladbrokes.com. Cela dit, attention aux mauvaises affaires. Contrairement aux années précédentes, où les investisseurs pouvaient toujours compter sur de mystérieuses fuites, la lisibilité du secteur suédois est mauvaise. Voici quelques tendances repérées par nos senior literary analysts qui vous permettront de vous y retrouver.

Haruki Murakami : attention aux valeurs trop sûres !

L’écrivain japonais a le vent en poupe. Le succès mondial de son produit «1Q84» ne se dément pas. Le troisième tome a séduit sa base-clientèle un an seulement après le lancement des deux premiers. Cela étant, nos experts en trading littéraire déconseillent fortement de s’engager sur cette valeur. La stratégie de l’Académie Nobel a souvent été la diversification à l’international; or elle vient tout juste d’affermir ses bases sur le continent asiatique, en recapitalisant Mo Yan, le leader chinois du roman animalier. Pour les mêmes raisons, on doute de l’opportunité de miser sur Ko Un, poète coréen qui a au moins l’avantage d’offrir un meilleur rapport que Murakami, placement trop prudent pour être vraiment rentable.

Alice Munro : la Canadienne a la cote

On ne présente plus la marque canadienne Alice Munro, qui domine depuis plus de 40 ans le secteur, très porteur outre-Atlantique, de la short story. Il y a trois ans, elle remportait le Man Booker International pour l’ensemble de sa production, jugée «pratiquement parfaite» par les décideurs anglo-saxons. Deux facteurs en font un placement à envisager: les Nobel n’ont jamais mené d’offensive au Canada ; et ils pourraient tenter de féminiser l’image de leur label (en vingt ans, seules cinq femmes ont bénéficié d’un bail out venu du froid). Nos analystes, qui ont les yeux rivés sur leurs écrans depuis des semaines, ont remarqué un frémissement à la hausse de sa cote, qui en onze heures s’est hissée au deuxième rang chez les donneurs d’ordres.

Svetlana Alexievitch : la roulette biélorusse

On sait que le Nobel est un marché hautement affecté par le contexte politique et les rapports Est-Ouest. Depuis les OPA sur Pasternak et Soljenitsyne, l’opposition suédoise à l’expansion soviétique et son effort pour permettre l’entrée de l’ancien bloc communiste dans l’économie de marché n’a échappé à personne. Dans la droite ligne de cette stratégie, le choix du conseil d’administration pourrait se porter, selon les plus hardis de nos analystes, sur Svetlana Alexievitch, écrivain-journaliste biélorusse. Auteure de livres sur Tchernobyl, sur la campagne militaire russe en Afghanistan ou sur«la Fin de l’homme rouge», titre de son dernier produit littéraire, tout juste lancé sur le marché français, elle a déjà séduit des agences de notation, comme l’ONG humanitaire Oxfam, qui lui a décerné un triple A en 2007. Placement risqué, mais très bonnes promesses de plus-value sur les plateformes de trading comme Ladbrokes, avec une possibilité de quintupler son investissement.

Joyce Carol Oates : le facteur industriel

Joyce Carol Oates ne connaît pas la crise. Depuis 1968, date de son apparition sur le marché littéraire, elle a publié 113 livres. Son secret ? Elle a su rationnaliser ses flux de production et diversifier son activité : roman, essai, nouvelle, poésie, littérature jeunesse, théâtre. Cette productivité industrielle à toute épreuve s’est accompagnée d’une capacité hors du commun d’adaptation aux nouvelles technologies, notamment sur Twitter où la somme de ses tweets pourrait remplir 113 autres livres. C’est connu : rien ne vaut une valeur financière adossée à une solide assise dans l’économie réelle. Le Nobel pourrait en outre être séduit par l’idée d’entrer sur le marché américain, qu’il a délaissé depuis 1993, année où Toni Morrisson avait décroché le fameux contrat.

Adonis : la Syrie, eldorado des investisseurs malins

Le bon donneur d’ordre prête toujours une grande attention aux évolutions du contexte géopolitique. Tandis que l’OIAC attend un cessez-le-feu pour détruire les armes chimiques de Bachar al-Assad, lepoète syrien pourrait recevoir le soutien la coalition suédoise. Ne soyons pas cyniques, mais n’oublions pas non plus que la guerre est l’amie des fortunes vite bâties.

Jon Fosse : l’hypothèse d’un protectionnisme scandinave

Il y a deux ans, le fonds monétaire du Nobel avait surpris la planète économique en attribuant son aide financière annuelle à Tomas Tranströmer, poète suédois nonagénaire. Nos analystes ont cette année repéré des mouvements intéressants sur l’action de Jon Fosse, dramaturge norvégien franchisé en France par Claude Régy et le regretté Patrice Chéreau. Sa cote a brusquement grimpé. Le Nobel a-t-il cédé à la tendance de la relocalisation économique? Face aux incertitudes de la globalisation, entend-il devenir un «locaprix»? Avis aux investisseurs audacieux : il y a des couronnes à se faire.

Ngugi Wa Thiong’o : l’Afrique, nouvelle terre promise

Tous les think tanks le disent: l’Afrique est un continent d’avenir. L’écrivain kenyan pourrait s’imposer comme la star des portefeuilles bien structurés. «Prisonnier d’opinion» célébré par Amnesty International après son année de réclusion pour une pièce de théâtre contestataire jouée en kikuyu devant un public populaire à la fin des années 1970, auteur de livres interdits par le pouvoir kenyan, exilé politique et grand habitué des universités anglo-saxonnes, Ngugi Wa Thiong’o apparaît comme un investissement compatible avec l’éthique corporate de la firme Nobel.

Peter Nadas : si le cœur vous en dit

Voilà quinze ans que le Hongrois Peter Nadas a lancé son superbe «Livre des mémoires» sur le marché européen, s’imposant comme une valeur sûre du secteur. On remarquera toutefois qu’il a négligé, dans sa stratégie d’expansion, son implantation éditoriale en Suède. En regardant les transactions passées ces derniers jours, force est de constater que certains investisseurs semblent lui faire confiance. Mais on vous met en garde: placement risqué.

Source: Le nouvel observateur

Tony Morrisson: Good, but never simple


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Toni Morrison silenced the audience in Sanders Theatre on Thursday afternoon, not with one of her own stories, but with a tragic tale from real life.

The author, the recipient of the Nobel Prize in literature in 1993, recounted the “mindless horror” of the 2006 murder of five Amish girls in a one-room Pennsylvania schoolhouse by a gunman who then committed suicide, and the shocking reaction to the tragedy. Instead of demanding vengeance, the community comforted the killer’s widow and children.

Their behavior “seemed to me at the time characteristic of genuine goodness, and so I became fascinated, even then, with the term and its definition,” Morrison said. Above all it was the community’s silence, its refusal “to be lionized, televised,” she added, “that caused me to begin to think a little bit differently about goodness as it applies to the work I do.”

Morrison expanded on the theme of goodness for the Harvard Divinity School’s (HDS) 2012 Ingersoll Lecture on Immortality. In a talk titled “Goodness: Altruism and the Literary Imagination,” she explored how authors illuminate concepts of good and evil. She also examined the treatment of goodness in her own novels.

“Expressions of goodness are never trivial in my work, they are never incidental in my writing. In fact, I want them to have life-changing properties and to illuminate decisively the moral questions embedded in the narrative,” she said.

“It was important to me that none of these expressions of goodness be handled as comedy or irony, and they are seldom mute. Allowing goodness its own speech does not annihilate evil, but it does allow me to signify my own understanding of goodness: the acquisition of self-knowledge. A satisfactory or good ending for me is when the protagonist learns something vital and morally insightful and mature that she or he did not know at the beginning.”

A true exploration of goodness demands a thorough examination of its opposite, Morrison argued. The author, who won the Pulitzer Prize for fiction in 1988, said that she has never “been impressed by evil,” and that she is “confounded by how attractive it is to others and stunned by the attention given to its every whisper, its every shout.”

“Evil has a blockbuster audience,” she said, “goodness lurks backstage.”

With a few notable exceptions, the 19th-century novel made sure goodness triumphed in the end. Writers such as Dickens, Austen, and Hardy mostly held to a formula that left their readers turning the final page “with the sense of the restoration of order and the triumph of virtue.”

But there was a “rapid, stark” shift away from such endings in the wake of World War I, as writers confronted a catastrophe “too wide, too deep to ignore or to distort with a simplistic gesture of goodness.” In Faulkner’s “A Fable,” which tells of trench warfare between German and American forces, “evil grabs the intellectual platform and all of its energy,” said Morrison.

Goodness hasn’t fared well since. Through portrayals of grief, melancholy, missed chances, and personal happiness, authors depict their versions of evil. “It hogs the stage,” said Morrison. “Goodness sits in the audience and watches, assuming it even has a ticket to the show.

“Many of late and early 20th-century heavyweights – Norman Mailer, Saul Bellow, Philip Roth – are masters of exposing the frailties, the pointlessness, and the comedy of goodness,” she added.

But in Morrison’s work virtue is a force, and it takes various forms, including the instinctual form of a mother desperate to save her child.  In “A Mercy” (2008), which revolves around slavery in the United States in the late 1600s, one of the main characters gives her child away to a stranger in order to save her.

The mother’s compelling motive, “seems to me quite close to altruism, and most importantly is given language,” said Morrison, “which I hoped would be a profound and literal definition of freedom.”

For the past three months, members of the Harvard community have met weekly at HDS to explore the religious dimensions of Morrison’s writings. The working group was convened by Harvard’s Davíd Carrasco (pictured) and Stephanie Paulsell.

In the mother’s words, Morrison read: “To be given dominion over another is a hard thing. To wrest, or take dominion over another is a wrong thing. To give dominion of yourself to another is an evil thing.”

Many in the crowd arrived well prepared. For the past three months, members of the Harvard community have met weekly at HDS to explore the religious dimensions of Morrison’s writings. The working group, convened byDavid Carrasco, Harvard’s Neil L. Rudenstine Professor of the Study of Latin America, and Stephanie Paulsell, Houghton Professor of the Practice of Ministry Studies, brought together scholars from across the University.

Earlier Thursday the group met for the final time, with Morrison in attendance. “We are grateful to Toni Morrison for creating this extraordinary body of work,” said Paulsell. “We could swim and swim in it for several more semesters and never reach its depth.”

The guest of honor was ready to engage with an eager group that included avid readers and fans. In response to one question, Morrison expanded on the intersection of the divine and the human. “This is really what art is for … whether it’s music, or writing, or dance … that’s what it does in the best of times.”

Source:

Harvard Gazette